Combrailles Durables : des citoyens producteurs d’énergie solaire

25.11.2020

Interview de Valérie SOL, citoyenne bénévole et administratrice de la SCIC Combrailles Durables

Quel est l'historique du projet Combrailles Durables ?

Tout a commencé dans le petit village de Loubeyrat (1350 habitants) où la mairie projetait la construction d’une nouvelle école. Un groupe de parents d’élèves a proposé l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit de l’édifice, mais le budget communal ne permettait pas un tel investissement. Pour récolter des fonds, le collectif a créé l’association Combrailles Durables, en 2008. Deux ans plus tard, la première centrale photovoltaïque s’est concrétisée sur le toit de l’école et la SCIC Combrailles Durables s’est constituée. Ensuite, les membres de Combrailles Durables ont partagé dans les communes voisines leur expérience de réappropriation citoyenne de l’énergie. En dix ans, la SCIC a installé 22 équipements photovoltaïques sur les toits de bâtiments publics d’une dizaine de communes. Nous sommes parmi les précurseurs en France de la réalisation ces « grappes solaires », c’est-à-dire un essaimage de centrales photovoltaïques sur un territoire défini. Entre 2010 et 2017, le montage de ce type de centrale a eu le vent en poupe. Par la suite, c’est devenu plus compliqué car le tarif de rachat de l’électricité a baissé et des blocages administratifs sont survenus. Dès lors, nous avons décidé de poursuivre la dynamique tout en nous diversifiant vers d’autres projets.

Qu’est-ce qui a favorisé l’essaimage de Combrailles Durables ?

Les premières années, nous allions à la rencontre des collectivités territoriales pour faire connaître la démarche. Ensuite, la machine s’est inversée : les collectivités nous ont sollicités pour faire naître des projets similaires. Citons par exemple l’installation de 4 centrales photovoltaïques à Volvic (3 écoles et une salle des fêtes) ou à Blanzat sur la toiture d’une école à énergie positive (BEPOS). Des sociétés coopératives similaires à la nôtre se sont constituées dans la communauté d’agglomération de Vichy ou encore dans le parc naturel régional Livradois-Forez. L’ADN de notre démarche est de faire en sorte que les citoyens puissent se réapproprier la question des énergies renouvelables à l’échelle de leur territoire. 

 

Quels sont les bénéfices pour les citoyens et pour le territoire ?

Nous sommes 350 coopérateurs en tout, cela inclut des citoyens comme moi, des entreprises et des collectivités territoriales. La quasi-totalité des communes où sont implantées les centrales solaires sont aussi sociétaires. Les premiers bénéficiaires de cette électricité verte sont les bâtiments publics sur lesquels sont installés les équipements photovoltaïques mais aussi les maisons alentours, soit environ l’équivalent de 230 foyers alimentés en EnR. Lorsque les habitants choisissent d’être sociétaires, ils savent qu’il ne s’agit pas de faire des gains, mais plutôt de contribuer à un projet porteur de sens. Les revenus issus de l’énergie solaire peuvent faire éclore de nouveaux projets.

Quels sont ces nouveaux projets ?

Actuellement, nous accompagnons un projet éolien nommé Montcel Durable dans une commune des Combrailles. Cela sera d’ailleurs le tout premier parc éolien citoyen en Auvergne. Au sein du comité de pilotage de Montcel Durable, nous transmettons notre expérience en matière d’énergies renouvelables citoyennes. Nous réfléchissons aussi au potentiel développement de centrales photovoltaïques au sol mais cela n’est pas acté à ce stade. Dans un tout autre registre, nous avons engagé un nouveau projet d’agro-foresterie nommé « Combrailles Durables prend racine » : notre SCIC souhaite réinvestir une partie de ses revenus solaires dans la création d’un réseau de vergers potagers partagés dans les villages des Combrailles. Il s’agit essentiellement de plantes, arbres et arbustes comestibles cultivés selon des principes inspirés de la permaculture. Les premières plantations expérimentales ont été réalisées dans la commune de Loubeyrat. C’est une autre façon, en somme, de nous réapproprier le territoire de façon citoyenne et durable.

Quels conseils donneriez-vous à un collectif portant un projet d’EnR citoyennes ?

L’énergie et le temps donné par les bénévoles sont un facteur de réussite essentiel. Nous devons utiliser nos imaginaires et être créatifs pour nous réapproprier les enjeux de nos territoires. Par ailleurs, il est important de travailler en bonne intelligence avec les collectivités territoriales qui peuvent, en étant partenaires, apporter un réel élan.

Quels soutiens les collectivités territoriales et la Région vous ont-elles apporté ?

À la genèse du projet Combrailles Durables, le premier soutien a été le maire de Loubeyrat qui a donné carte blanche au groupe de parents d’élèves. Ce feu vert leur a donné une belle impulsion. La Région Auvergne-Rhône-Alpes a également apporté un soutien financier à d’autres projets en attribuant des subventions d’investissement.

Vous appartenez aux réseaux AURACLE et Energie Partagée, que vous ont-ils apporté ?

L’association Energie Partagée nous a apporté une aide financière et un accompagnement personnalisé, très utile dans la phase de montage du projet. Energie Partagée, c’est aussi un réseau de toutes les structures comme nous, sur lesquelles nous nous appuyons mutuellement un peu comme un centre de ressources. Nous sommes également en lien étroit avec le réseau AURACLE. AURACLE, c’est un peu la déclinaison auvergnat-rhonalpine du réseau national. C’est toujours intéressant de discuter de problèmes concrets que rencontrent les voisins, et de partager les expériences ! Enfin, nous avons été accompagnés par d’autres structures telles que France Active, la Nef (banque de finance éthique) ou encore des clubs d’investissements citoyens (tels que Garrigue et les clubs CIGALE). Notre statut SCIC fait que nous sommes également dans les réseaux de l’économie sociale et solidaire. La CRESS et l’URSCOP nous apportent également beaucoup : la technique n’étant pas la seule expertise nécessaire dans nos projets !